let's drunk (nick)

tu ne sais que penser du message que tu as reçu de la part de nick. tu avais remarqué ces derniers jours qu'il n'était pas forcément au meilleur de sa forme et tu as mis ça sur le compte de la fatigue ou d'un patient un peu chiant. après tout nick n'est pas connu pour sa grande patiente et gentillesse dans l'hôpital. tu ris un peu à cette pensée alors que tu quittes l'hôpital pour la journée. nick à déjà terminé la sienne, si son emploi du temps n'as pas changé récemment, mais il te l'aurait sans doute dit. tu passes une main dans tes cheveux, direction le Queens, mais pas pour rejoindre ton propre appartement, non, pas ce soir. tu t'arrêtes en chemin acheté une bouteille de vodka - tu as la certitude qu'elle ne survivra pas à la soirée - avant d'arriver chez ton ami. bien qu'ami soit un mot assez faible, votre relation étant beaucoup plus nuancée que cela et ça te fait rire quand tu entends de rumeurs dans les couloirs de l'hôpital au sujet de ce que vous pouvez bien être l'un pour l'autre. et toi, tu t'en amuses, de tout ça. tu arrives rapidement chez nick, mais tu as une légère hésitation avant de frapper, tu sais que sa petite sœur squatte chez lui depuis quelque temps. tant pis. tu toques trois fois à la porte et nick ne tarde pas à venir t'ouvrir. « toi t'as pas l'air d'aller bien ces derniers jours, alors j'te rapporte le meilleur remède contre la déprime ! » tu soulèves fièrement la bouteille d'alcool face au visage de ton ami. c'est peut-être pas la meilleure solution, mais c'est ta manière de fonctionner. 

Parfois Nick regrette son internat et les semaines interminables, regrette son statut de sous-fifre sans visage, à peine digne de répondre à la question d'un titulaire, regrette l'absence de vie sociale et d'horaires à peu près réguliers qui accompagnaient cette existence-là. Ça va et ça vient par vagues, ou plutôt par période, comme le symptôme bruyant d'un malaise qu'il ne veut pas reconnaître immédiatement. Il le sait, sa thérapeute aussi, et ça facilite la conversation. Mais pas aujourd'hui. Il a manqué son rendez-vous, la première fois en près de vingt-deux ans. Aussi buté et arrogant qu'il a pu être adolescent, il n'en a jamais raté un seul. Cette fois c'est différent. Cette fois ce ne sont pas ses parents qui ont brutalement disparu en les laissant orphelins, sa fratrie et lui, ce n'est pas non plus sa femme qui a plié bagages sans la moindre explication. Non c'est différent, parce que c'est Jamie, parce que c'est dangereux, parce qu'il est impuissant. Il le sait mais sa psychologue ne le sait pas, et s'il a soigneusement évité son étage à l'hôpital aujourd'hui, ce n'est pas pour décrocher à ses incessants coups de fil. Elle a certainement appelé une cinquantaine de fois depuis qu'il est rentré. Il n'a touché à son portable que pour envoyer un bref message à Eytan, aussi cryptique que désespéré. Il n'est pas encore au courant, et Nick ne sait pas vraiment s'il va le lui dire, mais Eytan sait toujours quoi faire, en toute situation. Ou peut-être a-t-il réussi à s'en convaincre, à force de se le répéter depuis une demi-heure. Louise n'est pas là et il n'a pas bougé du canapé, n'a pas enlevé sa veste ni ses chaussures. Il fixe le téléphone sans bouger, osant à peine respirer. Attendant Eytan et un changement d'atmosphère. L'air semble irrespirable depuis que Jamie a soufflé sa mauvaise nouvelle. Ou peut-être que c'est Nick qui ne peut plus respirer, oppressé par l'idée que la vie de son petit frère puisse lui glisser entre les doigts.

Prisonnier d'une litanie de pensées sombres, il sursaute en entendant frapper, songe une seconde que Louise a peut-être oublié ses clés avant de se souvenir de son texto et d'Eytan qui attend sans nul doute derrière la porte. Toujours là quand il faut (c'est bien le seul). Il lève une bouteille à hauteur de son visage, et Nick sourit faiblement. - Entre, qu'il murmure. La fatigue, ou plutôt l'anxiété, pèse sur ses épaules et il s'affaisse légèrement en se libérant de sa veste qu'il accroche à la patère. - Installe-toi, je vais nous chercher des verres. Et avant que tu ne demandes, non, ma frangine n'est pas là. Ce qui n'est pas une excuse pour te désaper pendant que j'ai le dos tourné, ajoute-t-il par-dessus son épaule, retrouvant un semblant de bonne humeur. L'effet qu'Eytan a toujours eu sur lui. C'est de courte durée cependant, et c'est la mine sombre qu'il le rejoint ensuite, un verre dans chaque main. Si se noyer dans la vodka était le remède à tous les maux, cela se saurait mais ça n'empêchera pas Nick d'essayer. Et qui mieux qu'Eytan pour l'accompagner ? - J'espère que personne ne t'attend chez toi, parce que c'est pas avec un verre ou deux que tu vas me remonter le moral cette fois, annonce-t-il, franc, avant de s'écrouler à nouveau sur le sofa comme s'il ne l'avait pas quitté.